samedi 29 mai 2010

La blogosphère au secours de la vieille presse ?

 (dessin emprunté au "New-Yorker")
Ami Blogueur, tu te sens comme une pauvre particule de plancton flottant anonymement dans un océan informationnel en perpétuelle expansion ? Ami TwitterJunkie, tu uses tes jours et tes nuits à gazouiller de la News en 140 signes pour être à l'avant-garde de l'avant-garde de la révolution journalistique et numérique...et puis un jour tu te demandes : à quoi rime tout cela ? Ce déluge de mots qui s'écoule comme le temps qui passe sur le sablier de ta "time line"... Mais voilà une nouvelle venue d'outre-Atlantique qui aura peut-être pour effet de réinjecter un petit shoot de dopamine dans tes neurones fatigués et de te redonner un peu
d'enthousiasme devant le clavier:
Lancé il y a seulement cinq ans, le HuffingtonPost a fait le pari de s'appuyer sur le meilleur de la blogosphère américaine plutôt que sur une rédaction de journalistes professionnels : il talonne désormais sur internet le "New York Times" avec 12,3 millions de visiteurs uniques aux Etats-Unis contre 13,1 millions pour la "vieille dame grise" (bientôt 160 ans au compteur) ! C'est l'institut Comscore qui a récemment publié ces chiffres pour le mois de mars. Le site fondé par la journaliste politique américaine Ariana Huffington et son confrère Ken Lerer avait déjà coiffé au poteau ce bon vieux "Washington Post" en fin d'année dernière, et devance largement le grand "Wall Street Journal" comme le montre le graphique ci-dessous :

(Source: Comscore)
Et en fin de semaine dernière, le même institut Comscore a publié de nouveaux chiffres confirmant la percée du Huffington Post, cette fois au niveau mondial : en avril dernier, le "HuffPo" (comme l'appelle ses fans) comptait plus de 22 millions de visiteurs uniques sur les 25 premiers marchés Internet, derrière AOL News (31 millions) et CNN.com (43 millions)...mais devant TOUS les autres sites des grands quotidiens américains. Wow ! Il s'est passé quelque chose en matière de presse sur la planète online.

Un "pure player" comptant à peine une cinquantaine de salariés et mixant news, journalisme d'investigation et  billets de blogs de personnalités des médias, de la politique, du business et du show biz (John Cusack, Bill Maher…voir ce blogger index) tutoie désormais sur Internet les quotidiens les plus prestigieux de la presse américaine qui emploient encore pour leur part des centaines de journalistes professionnels. Un véritable événement. Comme le rappelait récemment ma consoeur Capucine Cousin dans ce papier de 20Minutes.fr , le Huffington Post est désormais pris au sérieux par la grande presse : il a gagné deux années de suite les Webby Awards dans la catégorie blog politique. Et il compte 19 rubriques alimentées par des milliers de sources. Son secret ? Le HuffPo est divertissant, bourré d'infos people et insolites, il affiche des gros titres et plein de photos qui pètent sur sa home-page...mais surtout IL EST GRATUIT, car intégralement financé par la publicité.

Bientôt le plus gros site d'info au monde ?

Et voilà ce qu' Henry Blodget, l'ancien analyste gourou de la bulle Internet reconverti chez Business Insider, dit de cette  success-story : "D'ici cinq ans, le Huffington Post aura certainement dépassé les quelques sites qui restent hors de sa portée. Une fois au-dessus des CNN et autres New York Times, le HuffPo sera devenu le plus gros site d'info au monde".
Blodget sort sa calculette : le site a enregistré 15 millions de dollars de recettes publicitaires et il devrait doubler ses revenus cette année à 30 millions de dollars...puis faire rebelotte l'année suivante à 60 millions. D'ici cinq ans, le HuffPo "arrivera rapidement au-delà des 100 millions de dollars par an", s'enflamme le fameux rouquin qui nous prédisait des arbres qui montent jusqu'au ciel en l'an 2000. Les grands annonceurs comme American Express, IBM, Microsoft ou Ford se bousculent tous au portillon... Et même si à 100 millions de dollars de chiffre d'affaires le Huffington Post resteraencore  loin du milliard de dollars de revenus qu'affiche aujourd'hui le "New York Times", pour Blodget le premier a le vent de l'histoire dans le dos quand le second est sur le déclin : "A la fin de l'année, le Huffington Post sera plus gros que le NYT en termes de trafic (...)" et "il n'est pas déraisonnable de penser que dans le futur il le dépassera en termes de revenus", affirme l'ancien analyste de Merrill Lynch. L'intégralité de sa démonstration enthousiaste est ici en anglais sur le site de Business Insider. Et ici en français car mes amis d'Owni ont eu la bonne idée de bien vouloir traduire pour tout le monde.
Evidemment, j'entends déjà certains de mes confrères journalistes pester sur le thème le "HuffPo et les blogs ce n'est pas du journalisme!" (je reprends la phrase de Blodget puisque j'entends strictement la même chose au bureau). Ah bon. Moi j'en trouve des infos et des scoops sur ce site. Et aussi des billets d'analyses passionnants et décapants que l'on ne lira jamais dans la presse traditionnelle où les éditorialistes sont trop occupés à se regarder écrire ou à faire plaisir aux grands de ce monde en écrivant. Allez donc faire un tour sur le Huffington Post, mais aussi sur d'autres sites faisant appel à des blogueurs, qu'ils soient journalistes ou non, comme Gawker, le Druge Report et plus, près de nous Owni ou Slate.fr. Et jugez par vous mêmes.

La blogosphère est bien vivante

Non bloguer, tweeter, micro-bloguer...tout cela n'est peut-être pas vain. La blogosphère - que certains oiseaux de mauvais augure disaient moribonde au prétexte que les Djeun's lui préféraient Facebook - est bel et bien vivante. Et bien que blogueurs et journalistes se regardent toujours en chiens de faïence (à chacun ses torts : défiance et frustration d'auteur contre corporatisme et mépris), cette galaxie de journaux numériques à la première personne est peut-être, bien plus que l'iPad d'Apple, un début de réponse à la crise qui dévaste la vieille presse de Gutenberg incapable de s'adapter à l'ère numérique. Car le contenu est plus important que le contenant, le message l'emporte toujours sur le medium (et inversement, Mac Luhan marche dans les deux sens cher @narvic ! ;-). Le journalisme est certes un métier qui s'apprend. Un peu à l'école, et bien plus sur le terrain. Pour bien répondre aux 5 "W" (Qui, Quoi, Où, Quand, Comment) et même 6 "W" (avec le Pourquoi) il faut en pisser de la copie, suer sang et eau devant son clavier pendant quelques années. Ce n'est pas moi et mes 20 ans de carte de presse qui vous dirons le contraire. Mais chers confrères ouvrez les yeux, réveillez vous : le vieux monde du papier qui nous a fait journalistes est en train de s'écrouler et menace d'être balayé par le grand déluge numérique. Partout dans le monde les quotidiens perdent inexorablement des lecteurs et des recettes publicitaires. Une hémorragie mortelle qu'aucun garrot n'a pu encore juguler. De grands journaux centenaires disparaissent aux Etats-Unis (voir la liste sur ce site baptisé Newspaper Death Watch). Et plus près de nous, des quotidiens nationaux français se vendent pour une bouchée de pain : "La Tribune" pour 1 euro symbolique à sa directrice générale Valérie Decamp qui va tenter une énième relance acrobatique, "Le Monde" autour duquel tournent une foule de candidats (Claude Perdriel, le triumvirat Bergé-Pigasse-Niel, l'espagnol Prisa, l'italien L'Espresso, le suisse Ringier...) qui salivent tous à l'idée de s'offrir le plus grand quotidien français et ses 400 millions de chiffre d'affaires pour 60 millions d'euros seulement...

Ouvrir grand les fenêtres des salles de rédaction

Alors il faut ouvrir grand les fenêtres de nos journaux, aérer les salles de rédaction qui sentent de plus en plus la peur et parfois le rance d'une profession tétanisée, repliée sur elle-même. Non les blogueurs sont rarement des journalistes comme l'auteur de ces lignes. Mais les blogueurs sont des citoyens représentant toutes les couches de la société (enfin plutôt CSP +), venant de tous les horizons professionnels, culturels, politiques...Les blogueurs ressemblent à nos lecteurs quoi ! Alors pourquoi se priver d'un tel renfort pour plaire à nos lecteurs, "écrire pour être lu" comme on dit au CFJ ? Les ramener un peu vers le papier et surtout sur nos sites internet dont l'audience y gagnerait à voir la courbe du "Huffington Post". L'alternative suivante est désormais posée aux "grands" journaux qui le sont de moins en moins.
- Rester fidèle au journalisme de papa, bien au chaud entre soi en écoutant l'orchestre sur le Titanic en train de couler.
- Ou bien faire monter à bord du sang neuf, d'autres talents et d'autres regards sur l'actualité pour colmater les brèches et nous aider à pomper l'eau qui menace de nous envoyer par le fond.

N'ayez crainte, le journalisme est un métier, le commandant de bord sera toujours un grand professionnel reconnu par ses pairs et l'équipage du navire restera composé de cartes de presse. Mais les marins auxiliaires et autogérés que sont les blogueurs ne seront pas de trop pour nous aider à traverser la tempête numérique qui souffle sur la vieille presse. Car contrairement à la plupart des journalistes en poste, ils viennent tous du monde de l'internet et ils connaissent mieux ces eaux digitales que la plupart d'entre nous, élevés au rythme des bouclages à l'ancienne et des "A la" des ouvriers du Livre. Et dans leurs rangs, il y a une minorité de passionnés de l'actualité qui un peu comme nous, ont appris à chercher et à trier l'information, à la hiérarchiser, à la recouper, pour ensuite raconter une histoire ou donner leur point de vue sur l'Histoire en train de se faire.

Sortir de "l'économie de la gratitude"

Ceux là bien sûr, il faudra bien accepter de les payer décemment un jour ou l'autre. Car aujourd'hui, quand un journal fait appel à un blogueur, c'est encore et toujours dans le cadre d'un échange basé sur "l'économie de la gratitude" comme l'a bien expliqué le blogueur Vogelsong : tu signes de beaux billets sur mon site et en retour je te paie en audience et en notoriété. Point barre. C'est ce qui s'appelle un accord Win-Fuck, là où l'on devrait être dans le Win-Win pour que tout le monde soit content. A commencer par le lecteur qui devrait nous faire vivre par sa fidélité et son nombre, en payant pour lire et/ou en attirant avec lui les annonceurs publicitaires.
(dessin très parlant emprunté au "New-Yorker")
Vous doutez encore du professionnalisme des blogueurs ? Olivier, un ami lecteur fidèle de mon blog, qui vient lui même d'ouvrir le sien ["Le blog du communicant 2.0"], m'a envoyé cette étude du Project for Excellence in Journalism (PEJ) intitulée "New Media, Old Media" comparant la manière dont les blogs et les médias sociaux couvrent l'actualité par rapport à la presse traditionnelle, pour ne pas dire la vieille presse. Et bien selon les chercheurs de ce département du fameux Pew Research Center, si la presse Old School donne encore le La de l'actu sur Internet, ils la couvriraient plutôt bien...voire parfois mieux que certains journaux que l'on trouve encore en kiosques à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires de l'autre côté de l'Atlantique.
 "Si la plupart des articles apportant une information originale sont produits par des journalistes professionnels, la technologie ont permis à un nombre croissant de citoyens de participer à la couverture de l'actualité", explique en substance les auteurs de l'étude. Les Blogs, mais aussi Twitter ou le site de vidéos YouTube alliés à la miniaturisation des appareils photos et des caméras embarqués dans les smartphones permettent aujourd'hui à n'importe qui de publier une info et des images allant de l'actualité de quartier au secret d'Etat (le site Wikileaks dont j'ai déjà parlé s'en ait fait une spécialité).
Et si l'on en croit les chercheurs du PEJ, les blogueurs sont plus ouverts sur l'actualité politique et les évènements internationaux que les journalistes de la presse traditionnels. Ils sont même beaucoup plus calés (Geek Power !) pour les sujets technologiques que ces derniers. En revanche, ils s'intéressent moins à l'économie ou aux questions de santé et de médecine comme le montre le tableau ci-dessous.

 Cette saine curiosité, quand elle s'accompagne d'un vrai talent d'analyse et de plume, devrait inciter les journaux à courtiser les blogueurs pour qu'ils signent régulièrement sur leurs sites. Aux Etats-Unis, le "NYT" et le "Washington Post" l'ont bien compris : ils recrutent maintenant à tour de bras des blogueurs salariés comme tel pour faire face à la concurrence du "Huffington Post" notamment. En France, c'est encore la préhistoire de cette collaboration. Certains journaux comme "Le Figaro" et "Le Monde" ont une vraie politique d'agrégation de blogs. Mais les auteurs payés se comptent sur le bout des doigts. Et quand ils sont payés c'est avec un lance-pierre. Dans d'autres titres, les blogueurs sont essentiellement des journalistes...qui ont encore trop tendance à faire du pur journalisme (infos exclusives, éditos...) et n'y mettent pas forcément le ton et le regard personnels que demande l'exercice. Enfin, il y a encore des journaux où il n'y a pas de blogueurs du tout.
 Mais les temps changent. Et il suffirait qu'un véritable "Huffington Post" à la française pointe son nez sur le Web français pour secouer le cocotier de la vieille presse. Justement, mon petit doigt me dit qu'un projet en ce sens est en train de se monter autour de quelques journalistes et/ou blogueurs expérimentés. Tous de grands connaisseurs du monde de la presse...et de l'internet. Je vous en reparlerai.

Jean-Christophe Féraud

24 commentaires:

  1. Non, ils sont pas payés au lance-pierre les blogueurs du monde.fr, ils sont payés au clic.

    C'est presque pire, ouais, on peut le dire.

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  2. 2 remarques :

    McLuhan dirait plutôt le contraire : "the medium IS the message". ;-)

    Ne pas confondre "des" blogueurs et "la" blogosphère, ou du moins le projet d'une blogosphère. On peut s'interroger sur le fait que les blogueurs "embeded" dans les sites de médias participent réellement d'une blogosphère, comme un complexe spontané et autogéré de blogs interconnectés.

    Sinon, j'adhère assez à tout le reste, et je suis content de voir d'autres journalistes prendre enfin mon relais dans l'appel à l'abaissement de cette barrière très très artificielle placée entre blogueurs et journalistes.

    Le blog, comme outil, est même une perspective très intéressante de renouvèlement du journalisme. En lui-même, c'est à dire en dehors de ces projets d'agrégation/republication de blogs qui refleurissent à nouveau (ce n'est malheureusement pas la première tentative !) et qui fleurent bon la tentative de récupération, à mon humble avis...

    Mais d'autres travaillent à d'autres choses... ;-)

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  3. je ne sais pas si blogueurs quasi-pro et journalistes sont si différents. A part le salaire sans doute.

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  4. Billet hyper complet et intéressant à lire.

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  5. Lorsque tu sais que les journalistes ne regardent bien souvent pas le site internet de leur propre journal et ne savent pas comment il est foutu, que lorsque tu proposes de créer un blog pour ton journal pour donner un point de vue plus vivant, différent, cela prend 6 ans, tu perçois un peu l'immensité du boulot à faire.

    Sinon, en poussant un peu ta nalyse de l'analyse du PEJ, on notera que si les bloggeurs ne traitent pas de l'économie, de la santé et de la médecine cela signifie, en reprenant ta logique du "les bloggeurs ressemblent à nos lecteurs", que les lecteurs ne s'intéressent pas à ces thématiques. Pourquoi y a-t-il donc de plus en plus de pages sur la mico-économie et les entreprises dans les journaux généralistes et même dans les médias éco comme le tien? Car ce sont elles qui attirent la pub (hop, y a un article sur Carrefour, le groupe français est mis au courant par la régie pub du journal et balance un pub en face de l'article). Ainsi, ce type de contenant s'avère avant tout pécuniaire et se révèle contre-productif vis-à-vis des lecteurs généralistes puisqu'il ne l'intéresse pas.
    Or, en transposant cette idée sur le net, les annonceurs doivent bien s'apercevoir, grâce aux clics, que les lecteurs se contrefoutent royalement des articles éco et que leurs pubs ont donc des retombées très très limitées. Sur le net et, par mimétisme, sur le papier. Au lieu de dire que les tarifs de pub sur le net sont ridiculement faibles (ce qui est plus que vrai), on devrait donc surtout se féliciter qu'ils ne se soient pas encore effondré sur le papier... On (les bloggeurs qui attendent d'être payés et les journalistes) est pas sorti de l'auberge.

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  6. Toujours la même analyse. Toujours la même erreur. L'audience des réseaux sociaux ne remplacera pas le journalisme. Comment le pourrait-elle?

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  7. J-C Féraud qui cite son petit doigt, sans en dire plus, Narvic qui soupçonne ou suggère, sans en dire beaucoup plus... Si les bloggers se mettent eux aussi à jongler avec le off et le on, c'est à désespérer. Allez les gars, si vous avez une bonne info, ne tournez pas autour du pot, balancez la!

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  8. Narvic est toujours aussi méprisant. ça rassure ceux qui le savaient déjà..

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  9. Le Huffington Post est-il un blog? Comme tu le dis, il emploie 50 personnes, des journalistes, donc c'est un site d'information, comparable à rue89 (mais en 10 ou 50 fois plus gros).

    Mais il est vrai que la référence, c'est ça: une bonne compréhension de l'écosystème des blogs, une valorisation intelligente des commentaires et des contributions.

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  10. Tiens, un anonyme qui vient faire ici la publicité pour la proposition de loi Masson : se cacher derrière l'anonymat pour lâcher une attaque qu'on n'assumerait pas publiquement...

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  11. @narvic

    Il faut l'assumer. Les blogs de journalistes (précaires ou pas, plutôt plus d'ailleurs si La Tribune vaut 1 euros et 10 millions de Trésorerie) diffusent tellement d'énormités.

    Vous êtes assez solide pour supporter un sarcasme et nous nous sommes assez grands pour juger s'il est pertinent.

    Non?

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  12. Juste une petite précision :

    L'étude du Pew, qui s'intéresse à la circulation de l'info plus qu'à sa production (et son éventuelle co-production) montre également que 99% des sujets traités sur les blogs ont pour origine ... un média pro (sur Twitter, le pourcentage est à peine plus faible).

    Autrement dit : la hiérarchie de l'info, sur les médias sociaux, n'est pas la même que sur les médias pros ... mais les journalistes professionnels conservent la maîtrise de l'agenda (ce sont eux qui mettent les sujets à l'agenda). ET ils restent, quoi qu'il en soit, les vrais producteurs d'infos (selon l'étude, évidemment !)

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  13. Salut JC,

    J'aimerais bien savoir si le HuffPost rémunère ses blogueurs. C'est une vraie question à l'heure où l'on vois fleurir tous ces sites de presse qui se gargarisent de disposer d'une galaxie de blogs de haute qualité...

    J'ai assisté récemment à une conf où intervenait Laurent Mauriac de Rue89. Il m'assurait rémunérer les blogueurs "qui vivent de leur plume"... donc pas les autres, ces fameux "experts" "qui ont un métier à côté".

    Est-ce juste? Est-ce équitable? Est-ce un accord "win-fuck"? Chais pas, mais ça m'étonne que personne ne pose la question.

    Même chose concernant cette fameuse mode de la "coproduction" internautes-journalistes, dont se félicite le même Mauriac. Le principe: l'internaute m'apporte une primo info. "Super sympa, mec, on en fait un billet!". Les journalistes maison recoupent, vérifient, publient. L'internaute se félicite d'avoir fait passer "son" scoop. Au mieux, s'il "vit de sa plume", c'est-à-dire q'il est pigiste, on lui proposera royalement 100 euros pour ce scoop, quelle que soit son umportance, la longueur du papier le cas échéant ou le temps passé à enquêter...

    Est-ce juste? Est-ce honnête? Le principe de la coproduction n'est pas né avec Rue89, pardon. Voici des lustres que le Canard Enchaîné fonctionne grâce à une galaxie d'informateurs qui lui font remonter toute sortes de scoops et de bruits de couloirs, que les journalistes maison vérifient à postériori. Eh bien l'informateur, tout comme le pigiste est chaque fois récompensé. Pas en clics, pas en notoriété, mais en vrai argent.

    Mon message serait donc le suivant: blogueurs "embedded", faites-vous payer ou allez bloguer ailleurs!

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  14. Quel sera le coût de la gestion d'un "troupeau" de bloggeurs experts par rapport à celui de 1,2 ou 3 journalistes spécialisés? Où sera le gain qualitatif et ou économique?

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  15. Pour info, Norman Mailer est mort il y a deux ans et demi.

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  16. Par ailleurs, votre lecture de la monographie du PEJ sur les médias de Baltimore est hyper partiale. Ce qu'il en ressortait d'abord, à mes yeux, c'est que l'écrasante majorité des infos étaient sorties par et dans les médias traditionnels, avant que les blogs ne les commentent et/ou complètent. Difficile d'imaginer que les premiers puissent être remplacés par les seconds...

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  17. @douzième :

    1)Merci pour la mise à jour concernant Norman Mailer, j'en suis rouge de honte (NB : ses billets figurent toujours dans le blogger index du HuffPo).

    2) Quant à ma lecture de l'étude du PEJ elle est peut-être partielle dans ce billet trop vite écrit, mais certainement pas partiale. Voyez plutôt ce précédent post intitulé "la presse old school donne le la aux sites internet" qui m'avait valu des attaques en sens inverse :
    http://monecranradar.blogspot.com/2010/01/la-presse-old-school-donne-toujours-le.html

    Bien cordialement
    JCF

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  18. Petite précision (2), d'après l'étude :
    "More than 99% of the stories linked to in blogs came from legacy outlets"
    Ce qui veut dire que 99% DES LIENS vont vers les main stream media, mais cela ne veut pas dire que 99% des blogs parlent des sujets des médias...

    Grosse différence, non ?

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  19. Merci Jean-Christophe de me reprendre dans ce billet très intéressant.

    Mais contrairement à ce que que Narvic déduit un peu trop vite en se disant "content de voir d'autres journalistes prendre enfin mon relais dans l'appel à l'abaissement de cette barrière très très artificielle placée entre blogueurs et journalistes",je pense que le métier de journaliste et l'activité (pas sûre qu'il faille parler de métier) de blogueur restent très différents. D'autant qu'il ne me semble pas que c'était le propos exact de ton billet.`

    La carte de presse, mais surtout les méthodes de travail (vérification et recoupement des sources, la hiérarchisation de l'info...) et bien sûr le respect de la déontologie sont de spoints qui distinguent clairement jurnalistes et blogueurs.
    On peut tout à fait être journaliste ET écrire un blog (ce qui est mon cas ;), dans les deux cas, les pratiques sont très différentes.
    Cela devient une antienne, mais il est toujours bon de rappeler la distinction.

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  20. Mon petit doigt à moi dit : Jacques Rosselin (fondateur de Courrier international et de feu Vendredi) et Benoît Raphaël (ancien rédac chef du Post). Ce sont les deux noms dont je suis sûr. D'autres circulent. J'imagine que le petit doigt de M. Féraud complètera très vite la liste...

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  21. Cela dit, hormis le coup du petit doigt, qui témoigne encore des réflexes du journalisme papier (je le sais, j'ai aussi 20 ans de carte de presse et j'aurais fait pareil, je n'aurais pas grillé le sujet d'un bon article pour le seul plaisir de donner l'info en trois lignes...), hormis cela donc, c'est un papier remarquable. J'aime beaucoup le "Win-Fuck deal". Pour info, au Monde, le tarif standard du blogueur invité ET payé (parce qu'il y a des blogueurs invités ET fucked) est de 500 euros par mois + partage des revenus publicitaires. C'est le principe du contrat d'auteur transposé du monde classique de l'édition à celui de l'info web : les 500 euros sont l'équivalent de l'à-valoir et les revenus publicitaires celui des droits d'auteur générés par la vente des livres. Avec 500 euros pour un papier par jour, on est largement fucked quand même... Néanmoins, un auteur comme Pierre Assouline, qui est arrivé avec ses contrats publicitaires sous le bras, se fait des balls in gold sur lemonde.fr...

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  22. @Crapaudin : tu es bien informé ;-)
    Pour Lemonde.fr,oui je connais ces tarifs win-fuck...j'ai eu une touche avec eux pour mon blog. Il se passera encore du temps avant que l'on entre dans une relation Win-Win de blogueurs à médias. A moins que notre fameux HuffPo made in France explose tout sur son passage et fasse de la blogosphère le nouveau must have de la presse. On peut toujours rêver ;-)

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  23. >>Ami Blogueur, tu te sens comme une pauvre particule de plancton flottant anonymement dans un océan informationnel en perpétuelle expansion ? <<

    Le planton se sont les sites d'information, c'est à vous de nous dire comment vous vous vous sentez dans un océan de valeurs perdues.

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  24. Superbe article. Dommage que ces blogueurs ne soient pas rémunérés décemment.

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