mercredi 7 octobre 2009

Au "Parisien" c'est "Feu sur le Quartier Général !"


Décidément rien ne va plus au "Parisien". Deux semaines après le débarquement sans préavis de la quasi-totalité de la rédaction en chef (Dominique de Montvallon, Noël Couëdel, Gilles Verdez, Philippe Duley), le quotidien du groupe Amaury est en ébullition. Mardi soir, après le bouclage, quelques 200 journalistes (sur 340 cartes de presse avec les locales) se sont réunis en assemblée générale pour faire bloc face au directeur général du "Parisien", Jean Hornain...Et au-delà lancer un avertissement à la grande patronne du groupe, Marie-Odile Amaury. Dans une motion adoptée à l'unanimité, les journalistes du "Parisien" dénoncent "la brutalité des licenciements" et la "violence à l'égard de la rédaction". Mais le texte pointe surtout "un climat de déstabilisation visant à affaiblir (la rédaction) et la menacer par un plan d'économies". Une mise en cause directe des méthodes de Jean Hornain. Le directeur général du "Parisien", qui a déjà usé trois directeurs de la rédaction (Christian de Villeneuve, Vincent Régnier, Dominique de Montvallon) depuis son arrivée fin 2004, est soupçonné de vouloir faire un journal "low cost" sur le modèle d'"Aujourd'hui Sport", l'éphémère quotidien sportif lancé l'an dernier pour contrer "Le 10 Sport" et arrêté à la veille de l'été.

Car "Le Parisien" a déjà perdu 10 millions d'euros l'an dernier sur fond de crise généralisée de la presse quotidienne. Et la situation ne s'est pas arrangée depuis : au premier semestre, les recettes publicitaires du journal ont baissé de 10 % et les ventes au numéro se sont elles aussi effritées de 8 à  10 % malgré l'édition nationale "Aujourd'hui en France". Pour faire face à la situation, Jean Hornain a donc missionné le cabinet d'audit KPMG pour trouver des économies tous azimuts. Et à la grande fureur de la rédaction, un plan prévoyant au moins 50 suppressions de postes de journalistes - par départs "volontaires" - devait être présenté le 29 septembre dernier lors d'un CE extraordinaire. Depuis l'inquiétude est maximale dans les rangs du "Parisien" où l'on craint de voir la qualité éditoriale chuter à vitesse grand "V" : "Ces gestionnaires ont des tableurs dans la tête, ils ne connaissent rien au métier et vont couler le journal. Pour faire un grand quotidien qui donne le ton du 20 heures il faut une grande rédaction, des gens expérimentés. Ce n'est pas avec des jeunots payés au lance-pierre à faire du feuillet au kilomètre pour le web et le papier que Le Parisien va relancer ses ventes", s'enflamme un pilier de la maison. De fait la motion de mardi soir rappelle que "la rédaction est dépositaire de la qualité du journal". Dépositaire oui, mais pas propriétaire...
Car de son côté, l'actionnaire Amaury a son propre agenda. Selon nos informations, un nouveau comité d'entreprise devrait être convoqué début novembre au retour des vacances de la Toussaint : au menu le fameux plan social qui hérisse la rédaction et les syndicats du journal. Mais d'ici là, Thierry Borsa, le seul survivant de la rédaction en chef devra rendre un "projet éditorial" pour le nouveau "Parisien"... Un peu court pour réinventer un journal aussi compliqué à faire. D'autant que ce qui est fait aujourd'hui pourraît être défait demain : le groupe Amaury envisage toujours de recruter un "vrai" numéro un à l'extérieur !
Jean Hornain a bien tenté de déminer le terrain en faisant la tournée des services de la rédaction la semaine dernière. Il a notamment expliqué aux journalistes qu'il avait débarqué Dominique de Montvallon et ses adjoints "car le travail demandé n'avait pas été fait" : en substance le fameux projet éditorial qui devait remettre le journal dans le sens de marche n'aurait pas du tout été à la hauteur des attentes de Marie-Odile Amaury. "Pas abouti", a tranché la dame de fer. Ce qui explique aussi que le "consultant" Noël Couëdel, à l'origine du succès du "Parisien" dans les années 90, ait claqué bruyamment la porte, quelque peu vexé. Mais Jean Hornain n'a pas convaincu tout le monde. Au point qu' à la base, le mot d'ordre semble être "Feu sur le Quartier Général !". "En liquidant tout le monde autour de lui, Hornain est devenu son propre fusible. Le prochain à sauter c'est lui", affirme un vieux briscard. Mais c'est peut-être Madame Amaury, comme on l'appelle encore respectueusement, qui est en train de perdre la confiance de ses troupes. Au siège du "Parisien" à Saint-Ouen où on lui reproche - pour commencer - de s'être installée au nouveau QG de "L'Equipe" à Boulogne. Bref de ne pas aimer "Le Parisien"...
Noël Couëdel a donné le ton de la fronde anti-Marie-Odile en dénonçant dans une lettre ouverte au lance-flamme "le retournement de valeurs qui fait du cynisme, de la brutalité et de l'incompétence les nouveaux repères des actuels propriétaires de nos titres" ! Et il n'est pas sûr que le courrier adressé le 29 septembre dernier "à tous les collaborateurs du groupe" par son bras droit Martin Desprez suffise à refroidir la température. "Les valeurs que la famille Amaury insuffle à ce groupe sont faites de passion de la presse, de respect des lecteurs et d'un humanisme rayonnant", y assure le directeur général des Editions Amaury en appelant tout le monde à "travailler ensemble et se comprendre", et à faire preuve de "courage" et de "goût de l'effort". Un style...très personnel qui a quand même un peu détendu l'atmosphère au "Parisien".
Jean-Christophe Féraud

2 commentaires:

  1. ses troupes, manque le s. à part ça ça fait froid dans le dos et ça donne pas vraiment envie d'y bosser.

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  2. Merci pour cette lecture attentive, je viens de corriger...j'ai l'habitude de relire les autres et des fois je m'oublie ;-)

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